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jeudi 31 janvier 2013

un détail de taille







Bon, avant toute chose (et y'en aura beaucoup ce soir, des choses), je tiens à m'auto-congratuler chaleureusement, car en un an et demi d'existence de ce blog, j'ai réussi à éviter de tout ramener à mon physique "plus size"-esque. J'ai bien fait une allusion ou deux, me plaignant de certaines marques qui taillent un peu trop petit ou répondant à mon troll, mais sinon, je n'ai jamais vraiment ouvert les vannes de ma réelle expérience personnelle avec toute question de poids/taille. Je n'avais pas spécialement envie d'introduire cet aspect là de ma vie pas toujours très drôle dans ce lieu qui ne reflète que les belles choses de mon quotidien. Et surtout, j'avais envie que mon blog soit le seul endroit où je sois juste quelqu'un qui aime la mode, et non d'être immédiatement cataloguée comme "ronde qui aime la mode", car je suis juste normale, tout comme l'est une fille très mince, ou très grosse, ou que sais-je encore ?! Nous sommes tous des personnes, pas une taille ou l'incarnation d'une catégorie. Mais l'idée m'a tout de même traversé l'esprit plusieurs fois. Notamment en rentrant de Russie dernièrement, j'ai eu très envie de pondre un billet à chaud, encore blessée des remarques de la famille durant les fêtes, mais étant lue par celle-ci, je me suis abstenue. Si certains, certaines, me trouvent une prose relativement agréable à lire, sachez qu'en fait ma plume excelle en fait particulièrement plus dans l'acidité, la colère et la rage plutôt que dans la légèreté que je vous fais entrevoir ici tous les jours... Et comme je sais que les mots sont les armes les plus puissantes qu'il soit, je choisis soigneusement ceux que j'écris, ainsi que leurs destinataires. Gardant toujours beaucoup pour moi. Cette retenue, je la cultive depuis l'enfance. Tout comme mon "problème" ceci dit. Mais lorsque j'ai entendu il y a deux jours les propos "grossophobes" totalement irresponsables de Delphine Apiou, rédactrice en chef de Biba, sur Chérie 25 (la vidéo de l'interview a été enlevée de Youtube depuis, quel courage, mais vous pouvez suivre tout ça sur le blog de Big Beauty... les excuses foireuses de la principale intéressées sont assez croustillantes d'hypocrisie, et pas tellement mieux formulées que les propos d'origine d'ailleurs)... ça a été la goutte d'eau. Ce n'est pas la première bavure du genre que l'on a pu entendre ces dernières années, n'est-ce pas Karl ! Mais bon, disons que je pars de celle-ci. Chacun pense ce qu'il veut, soyons clairs ; on peut-même parfois dire ces choses-là, même si elles sont blessantes ou politiquement incorrectes, dans une sphère privée. Mais lorsque l'on a un pouvoir, une aura, et surtout, un public qui respecte ce que vous dites et prend votre discours au pied de la lettre... il faut aussi se souvenir que l'on a des responsabilités !

Parce que oui, dire à des milliers d'auditeurs, d'auditrices, qu'être "grosse" (pourrait-on d'ailleurs préciser la définition, hein ?!) est forcément "le mauvais choix", une maladie, un mal-être, une difficulté, un handicap, quelque chose dont on doit se sortir. Que "les grosses sont difficiles à habiller", qu'elles ne rêvent que de maigrir... tenir ce discours, c'est justement persuader tout le monde que ces quelques "kilos en trop" (encore une fois, vive les référentiels, poids idéal mon oeil, IMC un peu mieux... mais n'oublions pas que la morphologie n'est pas un modèle mathématique, et heureusement !) ou même pas, sont à éliminer de toute urgence sinon : on sera malade, on sera malheureux et on sera mal habillé. Dit comme ça, c'est presque drôle. Sauf que non (même si ça reste ridicule). Les personnes déjà complexées par notre charmante société de papier glacé représentée par des mannequins anorexiques de 15 ans, vont se conforter dans leur mal-être (qui existe justement à cause de ces préjugés rappelons le) et une peur chez des personnes qui n'y pensaient peut-être pas jusque là se créera ! C'est comme ça que tout ce cercle vicieux s'entretient. Remarque, c'est un engrenage plutôt lucratif pour la vente des numéros spéciaux régimes pas vrai ?! Quelle fin stratège la rubrique minceur/bien-être, bravo !

Comment je sais tout ça ? C'est bien simple. Je l'ai vécu, et je le vis. C'est cette peur du gramme en trop, cette nécessité de rentrer dans une norme "pour être heureux", cette course à la "perfection" (haha) qui m'a fait passer de simplement dans la tranche haute d'un IMC normal à l'obésité depuis le début de mon adolescence. A force de remarques (de la famille bien plus que du monde extérieur je précise tout de même) blessantes, de régimes, de yoyo, et de bien d'autres remarques (toujours celles de la famille, malgré de grosses frayeurs à certains moments quant à ma survie, oui oui...) depuis. Voyez plutôt : voici un tableau fait rapidement l'autre jour, de 2001 année de mon premier régime en 6e jusqu'à aujourd'hui. Certes j'ai du prendre une dizaine de cm d'un bout à l'autre du graphique, mais c'est pour vous donner une idée globale de la chose. Ouaip, de sacrés montagnes russes quand même tout ça ! Et elles me donnent fort la nausée, rien qu'à leur vue.





Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été un peu plus épaisse que les autres enfants de mon âge. Et on a toujours essayé de me limiter au niveau des desserts et goûters. J'étais différente. J'étais "la grosse". Bref, je disais donc premier régime pas encore adolescente. Je suis enchantée de tous ces compliments qui d'un coup, pleuvent sur ma personne : 10 kgs en deux mois de vacances scolaires c'est sûr, ça change ! "Nan mais vraiment, c'est mieux comme ça hein, parce que bon... c'est pas pour ton physique hein, c'est pour ta santé", qu'ils disaient. Mais arrivent les hormones et yallah on reprend tout l'année suivante, et bien plus encore. Je me stabilise au haut de la tranche d'IMC "normal". Mais on me reproche toujours d'être rondouillette, trop gourmande, pas gracieuse. Rebelotte à 15 ans donc ! J'étais bien, mais j'avais envie d'être "mieux". De contenter mes proches... Je perds donc une vingtaine de kilos en un an. Plus je perds, plus j'ai envie de perdre, plus j'ai peur de reprendre. Mais dans la glace, je ne vois qu'une grosse. Alors je me fais vomir après chaque repas, ou j'évite toujours le gras et le sucre. Je fais quatre à cinq heures de sport par jour, en combinaison de sudation (mais comment je l'ai eu ce foutu bac mention bien dans tout ça ?!). Je compte les grammes, les calories, la moindre activité physique... Je passe des heures à contempler mon ventre vide rentré en dedans le matin. J'ai une planque sous mon lit, de toutes les confiseries que j'ai si courageusement refusées : surtout les escargots de Lanvin à Noël, parfois je l'ouvre pour regarder, et me dire que c'est bien, je résiste "au diable". Je gâche un road trip Colorado/Utah en m'obligeant à garder les mollets collés aux cuisses, serrés par une ceinture, pour maintenir mes muscles contractés tant que je suis assise en voiture pour compenser mon inactivité, et à ne rien avaler. Je ne pense plus qu'à ça. Mes cotes sont saillantes, mon dos plus large que mes fesses. Mes cheveux tombent par poignées, je m'évanouis régulièrement, je n'ai plus mes règles. Mais ce n'est pas suffisant, je veux toujours plus. Enfin moins. Je déteste mon corps. J'en porte encore les cicatrices aujourd'hui. Je déteste le regard des hommes dans la rue, qui ne me considéraient pas comme un morceau de viande fraîche avec les kilos que j'avais avant, cette mentalité me dégoute. Heureusement, j'ai été "démasquée" avant un stade réellement critique. J'ai été suivie. Par une psychologue spécialisée, et par ma mère qui s'est beaucoup investie pour moi. Ma peur de l'hospitalisation a aussi du jouer. Bref, j'ai eu beaucoup de chance. Maudite anorexie !

Ce qui devait arriver arriva, j'ai repris. Vite, beaucoup, beaucoup. J'ai perdu tous mes repaires, mais malgré tout j'ai la sensation de me sentir mieux dans ma peau. J'essaie de me stabiliser. Et pendant un temps, ça marche. Je suis en très léger surpoids, mais je suis heureuse (oui oui c'est possible^^) car je vis, pour de vrai. Mais les remarques de la famille reviennent. Je suis "boulotte", j'ai "des jambeonnaux", "je me mets en danger". Je me remets aux régimes : Montignac, dissocié, hyperprotéiné, hypocalorique, chrono-nutrition, Weight Watchers... Mais je ne supporte plus la privation. Je m'y tiens un mois ou deux, je perds du poids, tout en résistant à mes vieux démons dont la petite voix m'incite toujours aujourd'hui après certains repas à aller me purger... et puis je craque, et reprends le double. Le triple.

Et puis dernièrement, j'en ai juste eu marre. J'ai tout simplement cessé de faire attention, me disant que ça ne servait à rien, et pensant me venger de ces années de privation. "Puisque je suis grosse, autant juste bouffer qu'est-ce que ça peut faire ?!". Et j'ai repris encore plus... Et puis pour voir, je suis montée sur la balance en revenant des USA. J'ai eu peur. J'ai dépassé la barre des 90. Et j'ai vu cette courbe se dessiner devant mes yeux... cette réaction en chaîne. Aurait-elle été ainsi si je n'avais jamais tenté de rentrer dans le moule, si on m'avait laissée vivre un peu différente ? A l'heure qu'il est je serais peut-être stable avec un IMC de 25, un peu "ronde" mais tranquille... Bref, tout ce temps perdu, tout ce gâchis m'a sauté au visage ! Le mieux est l'ennemi du bien.

Ce qui me frustre le plus à cet instant précis, c'est de voir qu'en regardant les photos de l'année dernière, à 75kgs (léger surpoids), lorsque j'ai voulu reprendre les régimes, le premier mot qui me vient à l'esprit est "parfaite" (je ne l'ai jamais pensé avant, même au fin fond de mon malheur d'anorexique... est-ce vraiment nécessaire d'aller d'un extrême à l'autre pour se rendre compte que c'était très bien avant ?!) ! Mais pourquoi diable ais-je voulu changer cela ?! Pour faire plaisir aux autres, mais moi dans tout ça ? N'ais-je rien appris de mes mésaventures passées ?!!! Bref, aujourd'hui, je veux juste revenir à mon petit surpoids d'antan qui m'allait très bien, avant de prendre l'autoroute vers l'accumulation de kilos (régimes à répétition) et de rendre une situation bénigne grave. Aujourd'hui, mon IMC dit "légère obésité". Et c'est arrivé par sottise. Je sais maintenant que je devrai faire attention toute ma vie : m'écouter moi, et faire attention, maintenant que je suis montée si haut, je peux y revenir très vite si je cesse d'être vigilante. Je dois y aller doucement pour prendre le moins de risques possibles, j'ai déjà reperdu 5 kilos en 3 mois, sans me priver. Mais j'ai peur que ça ne soit pas assez pour rentrer dans ma combinaison de plongée ou mon jean de moto au printemps, et j'ai peur de tomber à nouveau dans le restrictif, et le peu de bien que cela m'apporte... Je ne dis pas qu'avoir un gros surpoids, ou être obèse est "mal", ou "pas beau". Aucune de ces conneries. Au contraire, j'aime les femmes en chair, j'aime ne plus être le sac d'os de mes 16 ans. J'en veux beaucoup à ceux qui m'ont dit que je me mentais lorsque je disais être bien il y a un an... car maintenant, en effet, je ne le suis pas (à MON point de vue à présent, oui). Merci ! Et puis je ne veux surtout pas rentrer dans les détails "médicaux" car cela ne concerne que... les personnes concernées et non leur entourage. J'aimerais bien "utopiquement" que la société élargisse un peu son esprit, et son cœur à ce sujet... Mais ce qui dans mon cas me désole c'est que j'ai été poussée, peu à peu, à devenir un cliché. A devenir la "grosse" (pas que je ne m'aime pas, même si forcément, je constate une grosse différence depuis un an et que de ne plus rentrer dans certaines fringues, c'est vraiment chiant !) que la rue voyait en moi, alors que je ne l'ai jamais été (et quand bien même, qu'est-ce que ça pourrait vous foutre hein les gens ?!). Pour rien. Du vent. Et grâce à des paroles "bien pensantes" et des visions biaisées comme celles de Mme Apiou. Foutez-nous la paix, cessez de parler en notre nom alors que vous ne savez rien, et arrêtez de créer vous même les problèmes que vous "dénoncez" !


Ces discours voulus moralisateurs sont dangereux, gardez vos distances. Le "mieux" est vraiment l'ennemi du bien, vraiment...







PS : Désolée, vraiment tombée dans le pathos, parfois même dans la vulgarité ce soir, mais il fallait que ça sorte ! Pas non plus de traduction en anglais, même si j'aurais adoré mettre des "fucking" partout, car me replonger dans tout ça m'a vraiment épuisée...


PPS : Edit : J'y ai repensé dans la journée... En plus, elle est carrément mauvaise commerciale la mère Apiou pour nous vendre sa daube ! Elle les imagine comment ses lectrices exactement, format mannequin ??! Ouh pinaise ce que je suis encore énervée de tout ça !...